Constat : une attractivité en berne malgré des dispositifs innovants
Le système de santé français est confronté à une crise profonde de démographie médicale, aussi bien dans le secteur hospitalier que dans la médecine de ville. Les déserts médicaux s’étendent, et nombre de territoires ruraux, périurbains – mais aussi urbains – peinent à recruter ou fidéliser des professionnels de santé. Dans ce contexte, l’attractivité des territoires est devenue une priorité stratégique.
Un constat s’impose : les professionnels ne cherchent plus uniquement un emploi ou une installation, ils recherchent un cadre d’exercice souple, sécurisé, stimulant, et surtout, un projet collectif. L’exercice isolé séduit de moins en moins. De nombreux praticiens plébiscitent désormais les formes d’exercice partagé, mixant activité libérale et hospitalière, ou intégrant des dimensions de prévention, d’enseignement, voire d’engagement dans des dynamiques territoriales.
Pourquoi l’exercice mixte attire ?
Plusieurs études – à l’image de l’enquête 2023 du CNOM sur les attentes des jeunes médecins – soulignent l’attrait croissant pour l’exercice mixte ou coordonné. Il permet :
- Une variété d’activités, réduisant l’usure professionnelle ;
- Une sécurisation du revenu, surtout en début d’installation ;
- Un accès facilité à des plateaux techniques et à une équipe ;
- Une logique de réseau, où les professionnels se sentent moins seuls, mieux soutenus et plus utiles.
Mais ces aspirations ne suffisent pas. Encore faut-il que les conditions d’accueil territoriales répondent à ces nouvelles attentes.
Des modèles existent, qui sont trop peu exploités
Des outils existent déjà pour structurer l’exercice partagé ou attirer de nouveaux professionnels. Parmi eux :
- Le statut d’assistant à temps partagé permet à des jeunes diplômés en médecine d’exercer durant deux ans entre un CHU et un hôpital périphérique, entre deux hôpitaux ou entre la ville et l’hôpital. Il s’appuie sur un projet réel entre les structures d’accueil, adapté à leurs besoins ainsi qu’aux aspirations des candidats afin que le poste ne reste pas vacant. Surtout, il permet d’anticiper de répondre à des besoins actuels ou d’anticiper les besoins futurs des hôpitaux concernés.
- Le programme “400 médecins généralistes” (1er volet) vise à soutenir l’exercice mixte, entre un établissement public ou privé (sous un statut de praticien hospitalier contractuel) et une pratique en ville. L’exercice ambulatoire doit être situé dans une Zones d’Intervention Prioritaire (ZIP), une Zones d’Action Complémentaire (ZAC) ou un Quartier Prioritaire de la politique de la Ville (QPV).
Ces dispositifs ont en commun de miser sur des partenariats inter-secteurs : entre ville et hôpital, entre public et privé, entre sanitaire, médico-social et social. Pensés individuellement ou en dehors d’une stratégie globale d’établissement ou de territoire, ils manquent de sens et ne rencontrent pas les candidatures escomptées. Les inscrire comme des actions concrètes intégrées aux projets stratégiques leur donnera davantage d’impact.
Pourquoi est-ce encore si difficile à faire ?
Malgré les dispositifs existants, peu de territoires parviennent à transformer l’essai. Trois obstacles majeurs peuvent être identifiés :
- Un déficit de pilotage et de vision commune : trop souvent, les initiatives restent ponctuelles, portées par des individus isolés sans ancrage stratégique, avec des contraintes et stratégies individuelles des établissements continuant de primer.
- Des freins administratifs et statutaires : l’absence de souplesse dans les RH, les statuts, ou les conventions entre structures rend l’exercice partagé complexe à formaliser.
- Un manque de culture partenariale : les acteurs du territoire – établissements, professionnels, collectivités – ne travaillent pas toujours ensemble, faute de temps, de méthode ou de confiance.
Quels leviers pour inverser la tendance ?
Pour surmonter ces blocages, il est indispensable d’agir sur plusieurs fronts :
1. Construire des partenariats solides dès l’amont
Cela implique :
- D’associer les futurs professionnels à la définition de leur cadre d’exercice ;
- D’impliquer les collectivités locales, véritables facilitateurs logistiques (logement, transport, environnement de vie) ;
- De soutenir les projets de territoire intégrant une gouvernance partagée entre établissements, CPTS, maisons de santé, élus, usagers.
2. Développer des structures d’appui à l’ingénierie
La création d’équipes-projets territoriales pluri-institutionnelles peut permettre de :
- Repérer les besoins prioritaires ;
- Concevoir des postes d’exercice mixte sur mesure ;
- Sécuriser les parcours professionnels (mobilité, carrière, formations…).
L’appui d’experts en coopération territoriale s’avère ici essentiel : pour lever les freins juridiques, négocier les statuts, co-construire les fiches de poste, accompagner la mise en œuvre et l’évaluation.
3. Valoriser l’engagement territorial des professionnels
Il est crucial de reconnaître et valoriser l’engagement dans des dynamiques collectives :
- En intégrant ces dimensions dans la carrière hospitalière ou libérale ;
- En développant des formations à la gestion de projet territorial ;
- En soutenant les rémunérations liées à l’investissement hors soins (coordination, prévention, enseignement…).
Conclusion : repenser l’attractivité comme un projet collectif
L’attractivité territoriale ne peut plus se résumer à des incitations financières ou à la seule question de l’offre de soins. Elle repose sur la capacité d’un territoire à se penser comme un écosystème solidaire, ouvert et coordonné, offrant aux professionnels un cadre de travail motivant, sécurisé, flexible.
L’exercice partagé, les partenariats inter-secteurs, les projets territoriaux de santé ne sont pas des utopies. Ce sont des leviers concrets pour redonner envie aux professionnels de s’engager. À condition que les acteurs sachent jouer collectif – et s’appuyer, si nécessaire, sur un tiers facilitateur pour orchestrer cette coopération.
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