3 questions à Nicolas Boschetti, expert Systèmes d’information Etablissements de santé et médico-sociaux, fondateur de DSN.care

Les systèmes d’information sont partout : gestion des soins, RH, finances, achats, pilotage. Mais trop souvent, les établissements hésitent entre multiplier les outils ou freiner par crainte des coûts et des risques. Comment séparer l’essentiel de l’accessoire, et mettre le numérique au service de la performance ?
Entretien avec Nicolas Boschetti, expert en systèmes d’information hospitaliers.

1. Comment savoir si un SI contribue réellement à la performance d’un établissement

« C’est une question difficile, car la valeur d’un SI ne se mesure pas uniquement en ROI chiffré. Il y a une part subjective importante : que disent spontanément les professionnels de santé lorsqu’on leur parle de l’IT ? Que dit le directeur général ?
Un DG me confiait un jour : “si on ne me parle pas de toi, c’est que tu fais bien ton job”. Beaucoup pensent ainsi : pas de remontées négatives = des projets qui avancent = une performance globale au rendez-vous. Empirique… mais efficace.

Pour autant, l’approche systémique permet d’objectiver : données fiables, partagées, utilisées dans les décisions. Si le SI n’alimente pas les arbitrages RH, financiers ou qualité, il reste au rang de “centre de coûts”. L’enjeu est d’identifier si vos données éclairent vraiment la performance (qualité, RH, finances) et si l’établissement se donne les moyens de développer les usages des SI, ou si les données restent de l’information brute non fiabilisée et sous-exploitée. »

2. La priorisation des projets IT : mission impossible ?

« En période de forte contrainte, compte tenu des coûts associés aux projets informatiques et des nombreuses solutions qui arrivent en continu sur le marché, c’est LA problématique. Trop de projets, pas assez de moyens. La clé, c’est une gouvernance assez solide pour scorer et prioriser les projets, et surtout pour résister à la pression d’un professeur influent ou d’un service insistant.
La capacité d’un DSI à dire “non” varie selon les contextes et les tempéraments, mais sans cette discipline, la feuille de route SI explose.

On peut trouver des parades (externalisation, processus de priorisation robustes, comités de pilotage réguliers), mais il n’existe pas de martingale. Je travaille actuellement sur un benchmark des pratiques de gestion de projets IT dans les CHU : l’enjeu est d’apprendre de ceux qui parviennent à garder la maîtrise. »

3. Quels référentiels ou audits utiliser pour évaluer la maturité SI ?

« Il ne faut pas réinventer la roue. Des référentiels existent, génériques (ITIL, COBIT…) et spécifiques au secteur hospitalier :

• La Certification HAS, qui intègre désormais des critères SI utiles pour se situer.

• Les référentiels comme HIMSS, qui permettent de se comparer internationalement.

Mais surtout, pas d’innovation sans socle sain : matériel obsolète, hébergement fragile, documentation inexistante = tout projet ambitieux est condamné. Le diagnostic systémique aide à cartographier ces fondamentaux (hébergement, sécurité, gouvernance, conformité) avant de penser innovation. »

En résumé

Un SI performant, ce n’est pas un catalogue de logiciels dernier cri : c’est une stratégie cohérente, une gouvernance qui sait dire non, des fondamentaux solides et des données qui servent réellement au pilotage. La performance est autant affaire de perception que de chiffres, mais elle doit s’appuyer sur un diagnostic systémique pour être durable.

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